Ce cas de brutalité policière alléguée fait grand bruit depuis la semaine dernière où deux frères disent avoir passé un mauvais quart d’heure entre les mains des hommes de la brigade criminelle de Goodlands.
Salman Sahaduth, 20 ans, résidant à Mont-Goût, allègue avoir été victime de brutalité policière dans l’après-midi du vendredi 10 mai 2024. Cet électricien soutient avoir été torturé et battu par les éléments de la Criminal Investigation Division (CID) de Goodlands à tel point qu’il a dû être hospitalisé pendant trois jours. Suspecté d’être impliqué dans une affaire de vol, il a clamé son innocence haut et fort, déclarant que les policiers ont reçu de mauvaises informations ou se sont trompés de cible. En réalité, Salman n’a rien à voir avec cette série de vols, il a un casier judiciaire vierge et n’a jamais été impliqué dans des affaires criminelles.
Pour la famille Sahaduth, la vie à Mont-Goût, Pamplemousses, n’est plus la même depuis ce vendredi fatidique. Salman et son petit frère Farhaan, âgé de 17 ans, ne parviennent plus à dormir et leurs parents disent qu’ils font des crises d’angoisse depuis cet incident.
Une Journée Tragique
Leur mère, Shaminaaz, 42 ans, cuisinière à l’hôpital SSRN, revient sur ce vendredi traumatisant. Selon elle, de 13h30 à 18h, son fils Salman a été retenu au bureau de la CID de Goodlands pour un interrogatoire où il aurait été victime de brutalité policière. « Mo ti dan travay sa ler la, ver 14h, monn recevoir enn call depi ban kamarad mo garson. Zot dir moi ki CID Goodlands in aret Salman ek finn amenn li station san oken explikation. Zot dir moi ki ban officier la finn menace pou aret zot oussi si zot pa aler », raconte-t-elle.
N’ayant pas la possibilité de quitter son lieu de travail à cette heure précise, elle a contacté plusieurs proches pour obtenir des informations, mais sans succès. Aux alentours de 15h, elle a pris une permission et s’est rendue directement au poste de police de Goodlands. Elle a été surprise de constater que son autre fils, Farhaan, revenait du bureau de la CID. « Mo ti penser li oussi linn gagne nouvel ek pe vin get so gran frer. Mé li dir moi ki CID in vinn serss li depi dan lekol. Zot finn dir li ki so frer ek li in kokin dan biss ek pou ferm zot. Mo garson finn dir non, pa zot sa, zot finn ferme li dan enn toilet », déplore la mère désemparée.
Interrogatoire et Intimidation
En effet, Farhaan, élève de Grade 11 au collège DAV de Goodlands, a été interpellé par la CID de Goodlands le même jour sans que ses parents en soient informés, contrairement à la loi. Il raconte que bien qu’il n’ait pas subi de violence physique, il a été moralement torturé. « Kan mo ti dan biro CID, zot finn enferm moi dan toilet. Enn lapolis dir moi fim enn sigaret ek reflesi. Zot dir moi reflesi bien ek si mo dir ki moi ek mo frer finn kokin, zot pou laisse nou aler. Mo finn nier ek zot finn amen moi dan biro kot ti ena mo frer. So labouss ek so zorey ti pe saigner », raconte le jeune Farhaan, visiblement déboussolé.
Salman n’est pas un délinquant, selon ses parents. Malgré son jeune âge, il travaille dur, cumulant un emploi dans une usine de matelas le matin et dans un snack le soir, tout en exerçant son métier d’électricien pendant son temps libre. « Mo ban zenfan pa volerr. Zot inosan ek finn gagn baté pou narnier. Tou dimoun dan lekol finn penser ki kitsoz mo garson finn kav fer pou ki CID in vinn tir li depi dan klass. C’est enn acte inhumain seki zot finn fer kont mo dé garsons », laisse-t-elle entendre.
Malheureusement, Salman n’est pas sorti indemne de cet incident. Il a eu le bras droit fracturé, des ecchymoses sur le talon et une oreille peut-être perforée.
Demande de Justice
Accompagnés de leur avocat, Salman et son frère, en présence de leurs parents, se sont rendus à l’Independent Police Complaint Commission (IPCC), le lundi 13 mai 2024, pour déposer une plainte pour brutalité policière. L’aîné a expliqué dans sa plainte le calvaire qu’il a vécu, affirmant avoir été battu à coups de tuyau en plastique et qu’un officier a utilisé un taser pour le forcer à accepter les charges.
Shaminaaz est d’avis que ses deux fils méritent que justice leur soit rendue. « Mo dimann Premye minis ek Comisserr lapolis napa ferme lizier lor sa case la. Nou pou reklam demision sa ban officier CID kin fer sa la. Pou moi, sa ban policiers la pena zot plas dan lapolis moris. Zot pa merite porte sa badge la. C’est enn acte inhumain ek zot bizin paye les consekans. Zot enn la honte pou la force policierr moris. Zot bizin demisioner », conclut Shaminaaz, hors d’elle.
La CID de Goodlands nie les faits
La CID de Goodlands a également initié une entrée dans le « Occurrence Book » de la police le mardi 21 mai 2024, pour donner sa version des faits et a nié que Salman a été victime de brutalité policière. La brigade admet néanmoins avoir pris Farhaan depuis l’école et reconnait que le collégien est un mineur.
Selon le rapport de la police, trois détectives de la CID de Goodlands ont arrêté Salman Sahaduth pour le questionner en tant que suspect dans plusieurs cas de vol d’équipements audio installés dans des bus des régions de Goodlands et Grand-Gaube. Bien que Salman Sahaduth ait été longuement interrogé, il a nié les accusations. Aucun exercice d’identification n’a été réalisé faute de témoins capables de l’identifier.
Le même jour, les officiers ont également amené Farhaan pour interrogatoire. Salman a été libéré sans condition à 17h35 et s’est ensuite rendu à l’hôpital SSRN pour recevoir des soins.