Dan Ramzan, mo fami pe bizin stresser »
L’établissement de Curepipe refait parler de lui après que la direction ait sommé un enseignant de foi musulmane de se raser la barbe en plein mois de Ramadan.
Mohamad Jawed Ally Bahadoor, enseignant d’Art & Design au collège Mauritius depuis 2006, se dit humilié après un traitement dégradant qui, dit-il, porte atteinte à sa liberté religieuse. En effet, la direction de l’établissement secondaire lui a interdit de rester dans l’enceinte du collège et lui a demandé de rentrer chez lui pour se raser la barbe. Pourtant Jawed Ally Bahadoor porte une barbiche à peine visible, et ce, depuis qu’il exerce dans ce collège en 2006. « Auparavant, la direction ne m’avait demandé de me raser la barbe », confie-t-il. Il ajoute que depuis tout le temp, d’autres enseignants ont porté la barbe et la direction ne les ont jamais réprimandés.
Alors qu’il avait hâte de vivre le mois de Ramadan dans la tranquillité, l’enseignant avance que toute sa famille est affectée par cette situation. Pour lui, c’est une discrimination et une atteinte à la pratique de sa foi. « Je me sens humilié vis-à-vis de mes collègues d’autres confessions religieuses. Je suis extrêmement blessé et j’estime que je ne mérite un tel traitement surtout en ce mois de Ramadan », laisse-t-il entendre. Il n’est, cependant, pas resté les bras croisés et multiplie les démarches auprès des autorités compétentes.
« …Clearly shaved »
C’est 2009 que le Manager du collège fait envoyer un message à Jawed Ally Bahadoor par personne interposée pour lui demander de bien se raser avant de venir travailler. « Mo ti demann la direktion fer moi gagn en ecrit ki raison mo pa gagn drwa gard labarb. » N’empêche qu’il avait taillé sa barbe et opté pour une barbiche à peine visible, ce que le Manager avait approuvé. Cependant, à la fin du mois de février 2023[check date], la direction a fait circuler un ordre se lisant comme suit : « Male should be clearly shaved ». L’enseignant s’oppose à cette directive et il est convoqué par le directeur de l’établissement. « Mo ti dir ki pena oken la loi ki dir pena drwa gard labarb », avance-t-il.
Jawed Ally Bahadoor prend contact avec le président de l’Union of Private Secondary Education Employees (Upsee) qui lui demande d’écrire une lettre à la direction pour demander pourquoi n’a-t-il pas le droit de porter une barbe. Le lundi 3 mars [check date], il signe sa présence au bureau et après avoir fait l’appel en classe, il est réprimandé par le Manager qui, sur un ton véhément, l’exige de quitter l’enceinte du collège. L’enseignant se rend au poste de police de Curepipe pour consigner une déposition et s’est ensuite rendu au bureau du Travail pour déposer plainte. « Enn inspekterr dir moi ki dapré Worker’s Right Act, personn pa gagn draw empess enn employe gard labarb », dit-il. Il a également déposé, en main propre, une lettre au directeur de la Private Secondary Education Authority (PSEA).
Des poursuites
Le lendemain, c’est le même scénario. Jawed Ally Bahadoor n’est pas autorisé en classe et il se rend une fois de plus au poste de police de Curepipe et au bureau du Travail. « Mo finn oussi ale ministere ledikasyon pou zwen ene conseye », laisse-t-il entendre. Notre interlocuteur et son épouse, qui est aussi éducatrice, ont eu une rencontre avec le directeur de la PSEA. « Nou finn dir direkter PSEA ki mo misie ti ena problem lasante en 2022 ek si ariv li kitsoz akoz sa ban problem la, nou pa pou responsab. Nou finn oussi dir direkter la ki ban Ulémas pou pren position ek nou pou mediatise sa cas de diskriminasyon la. Direkter PSEA finn dir nou ki colez oblize laiss mo misie rentre pou travay », nous dit l’épouse de Jawed Ally Bahadoor.
Jawed Ally Bahadoor a déjà pris contact avec son homme de loi pour poursuivre en justice la direction du collège. « Mo sagrin ki finn bizin ariv ziska la mé dan enn gran mois Ramzan, mo fami pe bizin stresser akoz sa problem la », souligne l’enseignant qui se dit reconnaissant du soutien que lui apportent ses collègues d’autres confessions.
Il convient de souligner que le cas de Jawed Ally Bahadoor a été abordé lors du sermon du vendredi dans quelques mosquées de l’île et des associations musulmanes vont se pencher sur cette affaire après le mois de Ramadan.