Tout semblait se dérouler sans accroc pour l’alliance au pouvoir jusqu’à ce fatidique mardi.
Un simple incident, qui aurait pu rester anodin, a pris une tournure dramatique, ravivant ainsi le slogan « abus d’autorité ». Ce développement survient alors que le MSM peaufine les modalités de son alliance stratégique avec le PMSD, un mouvement qui redessinera les contours du paysage politique en réévaluant les relations avec ses alliés actuels.
En dépit des turbulences structurelles inhérentes à toute gouvernance, le gouvernement dirigé par le Premier ministre Pravind Jugnauth semblait profiter d’une accalmie bienvenue. Les récentes mesures budgétaires, considérées comme un coup de maître économique, avaient suscité un optimisme général, renforcé par un réajustement salarial généralisé, accueillant ainsi un soutien populaire qui consolidait le capital politique du gouvernement.
Faire la place au PMSD
L’une des principales préoccupations de Pravind Jugnauth à ce stade est de cimenter son alliance avec le PMSD, un partenaire clé pour pénétrer dans les bastions électoraux urbains. Il est clair que Xavier-Luc Duval, fin négociateur, se positionne pour obtenir le portefeuille stratégique de Premier ministre adjoint, un poste qu’il considère comme une condition sine qua non de cette alliance. Selon nos sources, ce réaménagement ministériel ne pose aucun problème majeur. Steven Obeegadoo, qui avait succédé à Ivan Collendavelloo à ce poste après sa révocation, semble prêt à céder volontairement cette fonction au leader du PMSD, en raison du poids électoral substantiel de ce dernier face aux petites formations issues du MMM. De plus, il est peu probable que le leader du Muvman Liberater soit en lice lors des prochaines élections, en raison de sa santé déclinante.
Après avoir octroyé le prestigieux poste de Speaker à Adrien Duval, figure emblématique du PMSD, et après que Xavier-Luc Duval a rendu publique une partie de sa « shopping list » soumise à Pravind Jugnauth, ce dernier semble contraint de redistribuer certaines cartes pour envoyer un signal fort à ses fidèles alliés, qu’ils ne sont pas relégués au second plan. Dans ce contexte, le remplacement du maire de Beau-Bassin/Rose-Hill, au profit de David Utile du ML, apparaît comme une décision tactique visant à préserver l’équilibre fragile au sein de l’alliance.
En revanche, le remplacement du maire à Curepipe semble être une manœuvre clientéliste, imprégnée d’un « communalisme scientifique » exacerbé. Le choix de Samy Chellum peut être interprété comme une tentative de charme électoral envers la communauté tamoule, dans un contexte de turbulences alimentées par la plateforme « Rann Nou Later », qui s’oppose farouchement à la relocalisation du projet du Centre culturel tamoul de Moka à Côte-d’Or.
La police pointée du doigt
Effectivement, cette plateforme a mis la police sous pression, mardi dernier, en organisant une manifestation pacifique à Côte-d’Or où se tenait la cérémonie de signature pour la nouvelle allocation de terrain. Ce qui aurait pu rester un événement insignifiant a pris une tournure beaucoup plus sérieuse en raison de l’intervention musclée des forces de l’ordre. La police, dans une tentative de restaurer l’ordre public, a dû employer la manière forte, procédant à plusieurs arrestations. Celle de Rajen Narsinghen, particulièrement spectaculaire, a fait sensation. Sa forte corpulence et sa résistance face à une demi-douzaine de policiers ont nécessité un usage accru de la force, cristallisant ainsi la tension sur la scène publique.
Face à cette escalade, Navin Ramgoolam, leader du Parti Travailliste (PTR), n’a pas tardé à stigmatiser le gouvernement, le qualifiant de « voyou », une rhétorique incendiaire visant à galvaniser son électorat et à saper la légitimité du pouvoir en place. Une opposition regonflée par de tels incidents pourrait devenir un adversaire redoutable dans le contexte politique actuel. Le gouvernement, désormais sous le feu des critiques, se retrouve dans une position précaire où chaque faux pas est scruté à la loupe et amplifié par ses opposants, risquant ainsi de dilapider le capital politique patiemment accumulé.
L’usure du pouvoir : Un risque imminent
L’usure du pouvoir est un phénomène bien connu dans les démocraties, où l’accumulation d’erreurs, de frustrations et de compromis finit par éroder la stabilité même des gouvernements les plus solides. Pour l’alliance actuelle, ce risque est d’autant plus palpable qu’elle navigue dans des eaux de plus en plus troubles. Les récents événements mettent en lumière que la route vers les prochaines élections sera tout sauf une promenade de santé. Bien que les mesures populaires du budget soient un coup d’éclat à court terme, elles ne suffisent pas à masquer les maladresses politiques.
L’alliance au pouvoir doit redoubler de vigilance et veiller à ce que des incidents similaires à celui de mardi ne se reproduisent pas. La tentation de répondre de manière disproportionnée à la contestation pourrait se retourner contre elle, offrant à l’opposition de nouvelles munitions pour critiquer la gestion du pays.
La moindre erreur peut avoir des répercussions considérables, non seulement sur la stabilité du gouvernement, mais aussi sur ses perspectives électorales. Il est donc impératif pour Pravind Jugnauth et son équipe d’éviter toute provocation inutile, afin de maintenir le cap et d’assurer une transition en douceur vers les prochaines élections.
Le temps joue désormais contre eux, et chaque jour apporte son lot de défis à surmonter.