Friday , 29 March 2024

Dawa Office : environ 400 personnes formées au mariage depuis 2017

« Foundation for a lasting marital relationship ». Tel est l’intitulé d’un programme de formation annuel destinés aux (futurs) couples, mis en place par le Dawa Office depuis 2017.

Ce programme de formation se veut être une plateforme pour éduquer et former des (futurs) couples, leur permettant ainsi d’affronter les aléas d’une vie de couple de sorte qu’ils puissent en tirer le maximum de bénéfice, dans un cadre islamique. C’est ce que fait comprendre Noor-E-Azam Allybocus, coordinateur au Dawa Office. « C’est surtout un moyen de réforme face à la dégradation continue que nous constatons parmi des couples dans notre société. Une dégradation illustrée par un taux alarmant de divorces, la violence au sein des couples et toutes les répercussions que cela engendre au niveau des enfants et dans l’entourage du couple », explique-t-il.

Le coordinateur au Dawa Office souligne que cette formation, étalée sur plusieurs sessions (voir détails plus loin) est dispensée par un groupe de personnes comprenant à la fois des Daa’i (prêcheurs), des personnes diplômées en étude islamique, des professionnels (avocat/légiste, médecins, comptable, naturopathe), entre autres. « Il y a des thèmes, comme la sexualité par exemple, qui sont abordés séparément, les hommes d’un côté et les femmes de l’autre », précise notre interlocuteur.

Parmi les participants, Noor-E-Azam Allybocus indique qu’il y a essentiellement des jeunes qui s’apprêtent à se marier. « Mais nous accueillons aussi des jeunes mariés, des couples avec des enfants, voire des divorcés », ajoute-t-il. Pour que la formation puisse être réellement bénéfique, notre interlocuteur est d’avis que celle-ci doit être suivie par les deux conjoints formant un couple. « Car, les enseignements et les conseils donnés vont aux deux personnes. Ainsi, lorsque le couple rencontre des difficultés par exemple, ils savent chacun à leur niveau comment ils doivent réagir pour gérer au mieux cette situation », en est-il persuadé.

Lors du dernier programme de formation, qui s’était tenu entre octobre et novembre 2022, le coordinateur au Dawa Office avance qu’un peu plus de 90 personnes avaient participé. « Et à l’issue de la formation, chaque participant reçoit un certificat si un taux suffisant de présence est respecté », souligne-t-il.

Evolution positive

C’est en 2017 que ce programme de formation est organisé pour la première fois par le Dawa Office, une branche de la Majlis Ash Shura Al Islami. Le projet, à l’époque, est initié par le Dr Hussein Peerbaye qui était le responsable d’alors du Dawa Office, avec le soutien d’autres personnes.

Lors de la première année, indique Noor-E-Azam Allybocus, 32 personnes ont participé à la formation, soit 25 femmes et 7 hommes, laquelle s’était tenue à Qur’aan House à Rose-Hill. « Face au succès de la première édition, le Dawa Office a décidé de renouveler l’expérience la prochaine année, soit en 2018. La formation est alors dispensée à la mosquée Noor-E-Islam à Port-Louis, sous la présidence de Reiza Sheriff. Depuis, c’est devenu une formation annuelle », dit-il.

Au fil des années, le coordinateur de Dawa Office indique que la formation a connu une évolution positive, tant sur le nombre de participants – 94 en 2022 contre 32 en 2017 – que sur les différents aspects de la formation. « Le contenu du programme est passé de 10 à 16 modules, avec notamment des thèmes plus variés. Au début, la formation était étalée sur 5 sessions. Nous sommes maintenant à 8. L’accueil des participants a aussi été amélioré. Ils obtiennent les fournitures nécessaires pour la prise des notes, des « hands-out » de certains intervenants, des collations chaque semaine, parmi d’autres », poursuit Noor-E-Azam Allybocus, précisant que cette formation demande une bonne préparation ainsi que des investissements.

Dans un souci d’amélioration, Noor-E-Azam Allybocus indique que le Dawa Office se penche sur la possibilité d’augmenter le nombre de formation par année ainsi qu’une éventuelle délocalisation de sorte à pouvoir accommoder encore plus de participants.

Témoignages de quelques participantes

Mubeenah Koodoruth : « Dissiper les idées reçues »

« L’opportunité d’apprendre sur ce sujet m’a été présentée et Alhamdulillah je suis heureuse d’avoir pris cette décision puisque ce cours m’a éclairée sur toute la notion conjugale, étant conçu de manière à englober tous les aspects majeurs de la vie conjugale. Primo, ce cours a dissipé les idées reçues que j’avais concernant certaines questions concernant la vie conjugale. Deuxio, j’ai appris des choses dont j’ignorais l’existence avant d’assister à ces leçons. Et tertio, ce cours m’a armée des outils nécessaires pour faire face aux défis d’une vie conjugale ».

Aarifah : « Obtenir des connaissances authentiques et justes »

« Je crois que tout comme nous nous préparons à affronter le monde du travail, donc de la même manière nous devons nous équiper pour gérer l’institution du mariage. Je pense fermement que ce cours nous fournit en connaissances justes et authentiques sur les préoccupations conjugales. Parfois, nous avons besoin de donner des conseils à nos amis mariés, mais sans connaissances authentiques, c’est difficile. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi ce cours afin d’obtenir des connaissances authentiques et justes d’après le Qur’aan et les ahaadiths. »

Aleeyah Lallmahomed : « Un éveil de conscience sur la relation de couple »

La formation sur le mariage dispensée à la mosquée Noor-E-Islam est réputée pour être complète, touchant une panoplie de thématiques qui sont directement et indirectement liées au mariage. L’union de deux personnes nécessite très souvent à ce que chaque conjoint comprenne la responsabilité qui lui incombe et aussi leurs droits et devoirs qui constituent le socle de cette institution. En ce qui me concerne, la formation a permis à un autre éveil de conscience sur la relation en couple où la fidélité doit régner, car c’est une condition sine qua non pour sa survie. »

Umm Mus’ab Nihar Jumnee : «La femme doit connaître ses devoirs envers son époux»

Il est important qu’une femme maîtrise les droits de son époux envers elle ainsi que ses devoirs envers ce dernier. Ce, afin qu’elle puisse remplir son rôle pleinement dans sa vie de couple. Tel est l’avis de Umm Mus’ab Nihar Jumnee, intervenante dans un cours matrimonial.

Toutefois, cette enseignante à l’école primaire islamique Doha à Port-Louis dit constater que les jeunes d’aujourd’hui ne sont pas bien informés, surtout sur le plan islamique. « D’où la nécessité de les éduquer, leur donner le support nécessaire et les conseiller  », estime-t-elle. Également conseillère familiale pour les femmes musulmanes, notre interlocutrice se réjouit néanmoins de l’intérêt que portent particulièrement les jeunes filles pour acquérir la connaissance. « Je constate qu’elles ont beaucoup de questions et sont assoiffées de connaissances. Ce qui est très bien, car lorsque nous formons une fille, c’est tout un foyer, voire une société qui en bénéficiera vu que ces filles seront les épouses et les mères de demain », considère-t-elle.

Depuis 2018, Umm Mus’ab Nihar Jumnee est l’une des intervenants au cours matrimonial organisé annuellement par le Dawa Office. Elle intervient sur un thème très particulier : les étiquettes de l’intimité à la lumière du Qur’aan et de la Sunnah. Lors de son intervention, en sus d’aborder d’autres sujets, elle dit mettre aussi l’accent sur le droit des époux. « Pour que la femme puisse remplir son rôle dans son couple, la Shari’ah préconise qu’elle comprenne les droits de son époux sur elle ainsi que ses devoirs envers son époux », fait-elle ressortir.

Umm Mus’ab Nihar Jumnee compare un époux à un directeur qui gère une institution qui est appelé, selon la Shari’ah, à subvenir aux besoins de son épouse et de ses enfants. « L’épouse, elle, a le devoir de s’embellir pour son mari et vice versa », dit-elle. Si notre interlocutrice dit avoir constaté que de nombreuses participantes commencent le cours avec un état d’esprit « rebelle » vis-à-vis de leurs futurs maris, toujours prêtes à contre-attaquer, elles finissent par avoir le cœur adouci à la fin de la formation. « C’est ça la Fitra (nature) de la femme », dit-elle.

La sexualité

Umm Mus’ab Nihar Jumnee indique qu’elle enseigne aussi aux femmes musulmanes de leur rôle dans l’intimité de leur couple. « Je leur dis toujours que la sexualité est un acte d’adoration, car le Prophète (SAW) a dit que si cet acte est fait dans le Halal (permissible), ça devient un acte d’adoration. Je mets l’accent aussi sur le fait que la vie sexuelle d’un couple ne dépend pas des richesses mondaines mais de l’état de l’amour de ce couple. C’est pour cela qu’il faut que cet amour soit sincère pour le Plaisir d’Allah sans tricherie, égoïsme et mensonge », avance-t-elle.

Notre interlocutrice ne manque d’ailleurs pas de comparer la relation d’un couple à une plante qui, dit-elle, a besoin de l’amour, de la pitié, de la sincérité et accompagnée d’une bonne intention de plaire à Allah pour pouvoir grandir et porter ses fruits.

Nashreen Hissoob, sociologue : «Apprendre à se connaître dans un cadre ‘halal’ avant le mariage»

Parlant de constat au niveau des couples à Maurice, la sociologue Nashreen Hissoob soutient que l’institution qu’est le mariage s’est fragilisée au cours des dernières années. « Il y a définitivement une baisse et aussi les mariages ne durent pas longtemps. Certains mariages religieux, ‘Nikah’, ne durent que six mois ou un an. De nos jours, les jeunes ont peur du mariage et ne veulent pas s’engager dans le long terme », constate-t-elle.

Nashreen Hissoob explique que diverses raisons sont à l’origine des mariages « fragiles » et des divorces. « Une des causes principales c’est une mauvaise communication entre les partenaires. En deuxième lieu, il y a l’intolérance qui va de pair avec l’individualisation. C’est-à-dire on se concentre sur son bien-être et sa joie personnels. On n’accorde pas d’importance au plaisir et au sentiment de l’autre. Ensuite, il y a la sécularisation, c’est-à-dire la perte des valeurs religieuse. Si nous sommes conscients qu’il y a un Dieu et que notre récompense ultime est auprès de Lui, nous aurons donc un but dans notre engagement matrimonial », estime la sociologue qui est aussi active au niveau de la Société islamique de Maurice (SIM).

Notre interlocutrice avance que la compréhension et le dialogue doivent primer au sein du couple afin d’avoir un mariage heureux et réussi. « Il faut comprend que chacun a un passé et un bagage émotionnel. Il faut aussi dissocier la fiction de la réalité, car beaucoup de jeunes sont influencé par les médias et ce qu’ils voient à travers des films. Il faut aussi être patient et prêt à faire des compromis. Le couple ne doit pas se prêter à un bras de fer. Je suis d’avis qu’il faut apprendre à connaître son partenaire dans un cadre ‘halal’ avant le mariage. Il faut que les futurs mariés puissent parler et partager leurs avis sur les différents aspects de la vie. De cette façon, ils pourront savoir ce que l’autre pense », préconise-t-elle.

Nashreen Hissoob ne manque pas de souligner que les beaux parents ont un rôle à jouer mais que cela doit être fait de manière à ne pas déranger l’harmonie au sein du couple. « Les beaux-parents ont de l’expérience sur le mariage et ils peuvent conseiller et être un support pour le couple. Cependant, ils ne doivent pas dépasser une certaine limite, car cela peut avoir des conséquences irréversibles sur la vie du couple. Je conseille aux beaux-parents de se joindre à des ateliers de formation pour mieux soutenir les jeunes couples », indique-t-elle.

Enfin, la sociologue encourage aussi tous les futurs mariés et les couples en général de suivre des cours matrimoniaux. « Une formation avant le mariage est plus qu’une nécessité désormais. Je pense qu’il faut d’abord sensibiliser les jeunes à la tenue de ces cours. Ce genre de formation aidera les couples à mieux s’entendre, accepter leurs différences et aussi ouvrir le dialogue sur les sujets importants tels que les finances, le soutien émotionnel, les relations sexuelles, entre autres », conclut-elle.

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