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Sheik Edris Mamodebaccus, nouveau centenaire : une vie dédiée à la propagation de l’Islam

  • Un demi-siècle comme imam à la Gulzar-E-Quadria Sunnee Masjid

Le vendredi 12 septembre 2025, Sheik Edris Mamodebaccus a franchi le cap exceptionnel des cent ans. Mais derrière cette longévité remarquable se dévoile surtout le portrait d’un homme qui a consacré plus d’un demi-siècle au service de sa communauté comme imam de la Gulzar-E-Quadria Sunnee Masjid, à Quatre-Bornes. Sa vie, façonnée par la foi, l’humilité et la discipline, illustre un engagement spirituel sans faille et un héritage humain qui marque plusieurs générations.

Les premières lueurs de la vocation

Né à L’Avenir, Saint-Pierre, Sheik Edris découvre très tôt l’appel de la religion. À seulement 12 ans, il ressent une attirance profonde pour l’Islam et nourrit une soif insatiable de connaissances. On le retrouve souvent dans la capitale, achetant des livres religieux pour quelques sous. Ces modestes acquisitions, faites avec une détermination rare pour son âge, témoignaient déjà d’un destin marqué par la quête spirituelle.

Après sa scolarité primaire, il choisit de s’immerger pleinement dans l’étude religieuse, convaincu que sa mission est de devenir imam. Son objectif n’est pas d’obtenir une reconnaissance sociale, mais d’accompagner, d’éduquer et de guider les fidèles sur le chemin de la foi.

L’ancrage familial

En 1953, il épouse Jawabee Soyden, compagne fidèle et soutien indéfectible dans sa mission. De cette union naîtront neuf enfants – cinq filles et quatre garçons – qui grandiront dans un foyer empreint de discipline, de respect et de valeurs islamiques.

Aujourd’hui, la famille Mamodebaccus compte 19 petits-enfants et 24 arrière-petits-enfants. Six d’entre eux sont devenus médecins, reflet de l’importance accordée à l’éducation et au service de l’humanité. Ses enfants ne cessent de rappeler avec fierté que leur père s’est sacrifié pour eux, leur transmettant non seulement une éducation, mais aussi une façon de vivre centrée sur la foi et le service.

Plus de 50 ans comme imam

C’est en 1959 que Sheik Edris s’installe à Quatre-Bornes. Il prend alors la charge de la Gulzar-E-Quadria Sunnee Masjid, où il officiera comme imam pendant plus de cinquante ans. Pour lui, la mosquée est un sanctuaire, mais aussi une responsabilité quotidienne. Ses proches racontent : « Dada mem ti pe ouver masjid, li nettoyer, li fer imam, li okip mayyat. »

Même après sa retraite officielle, Sheik Edris n’a jamais cessé de répondre à l’appel du service. Il continuait à remplacer l’imam, à faire l’appel de l’adhân et à accompagner la communauté lors des prières ou des cérémonies funéraires. Lorsque son départ a été annoncé, de nombreux fidèles n’ont pu retenir leurs larmes, tant son dévouement avait marqué les esprits.

L’éducateur et le guide

Au-delà de son rôle d’imam, Sheik Edris a aussi été enseignant à la madrassah, où il a formé plusieurs générations de jeunes. Ses cours ne se limitaient pas à la transmission de connaissances religieuses : il inculquait discipline, valeurs humaines et respect de l’autre.

Parmi ses élèves, certains ont marqué la vie publique mauricienne, comme le ministre Shakeel Mohamed. Cette influence démontre que son héritage dépasse le cercle religieux pour toucher le tissu social et politique de la ville.

Une piété incarnée

Dada Edris a accompli le pèlerinage à La Mecque à trois reprises, renforçant encore sa relation intime avec sa foi. Aujourd’hui, malgré une mobilité réduite, il demeure assidu à ses cinq salâts quotidiennes et à la salât de Jummah chaque vendredi.

Sa fille raconte qu’il lit le Quran cinq fois par jour, achevant une lecture complète chaque semaine. À 100 ans, Dada Edris garde toutes ses facultés et partage toujours sa voix claire en récitant des versets. Pour son anniversaire, il a tenu à offrir à sa famille un cadeau symbolique : la lecture à haute voix d’un passage du Saint Quran, geste qui résume à lui seul une vie entière de service et de piété.

Le patriarche respecté

Pour sa famille, Dada Edris est bien plus qu’un imam ou un enseignant. Il est le pilier autour duquel se rassemblent enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants. Tous soulignent sa tendresse, sa sagesse et son sens du sacrifice. « Dan mo destin finn marke pou mo viv 100 ans, et mo remercier Allah pou sa kado-la », confie le centenaire.

Loin de la vanité, il se dit simplement reconnaissant d’avoir eu la chance de consacrer sa vie à Allah et à sa communauté. Sa maison reste un lieu d’accueil chaleureux où il aime être entouré des siens, témoignant d’un amour familial aussi fort que sa foi.

Un héritage spirituel vivant

L’histoire de Sheik Edris Mamodebaccus n’est pas seulement celle d’un centenaire, mais celle d’un héritage spirituel transmis à travers plusieurs générations. Son parcours de plus de cinquante ans comme imam à Quatre-Bornes a façonné la vie religieuse de toute une communauté.

En célébrant ses cent ans, c’est un siècle de foi, de discipline et d’abnégation qui est honoré. Son exemple rappelle que la grandeur ne réside pas dans les titres, mais dans le service rendu aux autres. Et à travers ses prières, ses enseignements et sa bienveillance, Sheik Edris Mamodebaccus continue d’incarner une lumière pour ceux qui l’ont connu et pour ceux qui suivront son chemin.

Témoignages

Feroze Lallmohamed, ancien Chief Nursing Officer, soignant du centenaire

« C’est avec une immense émotion que je rends hommage à Dada Edris à l’occasion de ses 100 ans. J’ai eu le privilège de le côtoyer pendant près d’un demi-siècle, et je garde en mémoire de précieux souvenirs de son enseignement et de son dévouement. Je me souviens particulièrement des années 1970, lorsque nous nous rendions chaque vendredi à la masjid Gulzar-E-Quadria à Quatre-Bornes. Dada y incarnait l’âme de la communauté. Ses prêches simples, mais profonds, parlaient directement au cœur et traduisaient un amour sincère pour sa communauté. Modèle d’humilité et de simplicité, il ne recherchait ni honneurs ni reconnaissance, mais servait Allah avec dévouement. Son rôle dans l’éducation religieuse des enfants fut immense : des générations entières ont appris le Quran grâce à lui. Derrière sa rigueur se cachait la volonté de former des croyants disciplinés et respectueux. Son apport à Quatre Bornes est également tangible : sous son impulsion, de nouvelles mosquées ont vu le jour, renforçant l’ancrage spirituel local. Aujourd’hui, alors qu’il atteint ce cap exceptionnel, je lui adresse mes prières les plus sincères. Dada Sheik Edris restera un guide, un conseiller et un modèle d’humilité et de foi. »

Cassam Chuttoo, ancien élève de ‘Dada’

« Quand je pense à mon enfance à Quatre-Bornes, la première image qui me revient, c’est celle de Dada Sheik Edris assis avec son rotin à la main, le regard bienveillant mais ferme, nous rappelant à la discipline. J’étais encore un jeune garçon quand j’ai commencé à apprendre le Quran auprès de lui. Il avait une façon très particulière d’enseigner. Sa voix résonnait dans la petite salle, et même si parfois nous tremblions à l’idée d’oublier une sourate, nous savions au fond que sa sévérité n’était pas de la dureté, mais de l’amour.

Grâce à lui, j’ai appris non seulement à réciter, mais aussi à comprendre le sens de ce que je lisais. Dada insistait toujours sur le respect, la discipline et la sincérité dans tout ce que nous faisions. Aujourd’hui encore, ces leçons me guident dans ma vie quotidienne.

À cette époque, il n’y avait qu’une seule mosquée à Quatre-Bornes, et c’était un lieu central où toute la communauté se retrouvait. Nous, les enfants, étions privilégiés de recevoir ses enseignements directement. Et même si parfois le rotin faisait peur, c’est surtout son sourire discret, ses du’as pour nous et sa patience infinie qui sont restés gravés dans ma mémoire. Je prie pour qu’Allah lui accorde encore santé et sérénité, car il restera toujours pour moi plus qu’un imam : un guide, un éducateur, un père spirituel. »

Abedeen Kherdalee, un fidèle de la mosquée

« J’ai eu la chance de côtoyer Dada Sheik Edris au fil des années. Dada n’était pas seulement un imam respecté, mais avant tout un véritable savant de la religion. Sa connaissance approfondie du Quran et des traditions prophétiques faisait de lui une référence pour toute la communauté. Ce qui marquait le plus chez lui, c’était sa courtoisie et sa délicatesse dans la parole. Il savait s’adresser aux fidèles avec sagesse et bienveillance, sans jamais heurter les sentiments de quiconque. Ses sermons et ses conseils touchaient le cœur, car ils étaient portés par la sincérité et par une profonde humilité. Dada Idriss restera pour moi un modèle d’homme pieux, d’enseignant attentif et de guide spirituel dont la mémoire continuera à illuminer les générations à venir. »

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