Thursday , 5 December 2024

Les sacrifices d’Osman Soobrattee pour accomplir l’Umrah : 60 ans comme fossoyeur pour fouler la Terre sainte

Ne jamais perdre espoir, c’est ce qui vous donne la force de continuer à avancer. C’est la recette de Bhai Osman Soobrattee, âgé de 73 ans, fossoyeur au cimetière de Riche-Terre durant 60 ans.

Mlgré la rudesse de son métier et les difficultés de la vie, Osman Soobrattee a gardé espoir qu’un jour il foulerait la Terre sainte en compagnie de son épouse qui est souffrante. Nous l’avons rencontré cette semaine à La Mecque, à l’hôtel Emaar Grand, où il séjourne avec son épouse dans le groupe Noorie Islamic Movement, dirigé par l’imam Noorooddeen Auhammud. Bhai Osman, malgré son âge, garde toute sa lucidité et sa force pour continuer à avancer dans la vie.

Ses premières paroles prononcées à La Mecque sont un plaidoyer pour renforcer sa foi et croire qu’Allah n’abandonne jamais les gens qui se prosternent devant Lui tous les jours. « Dan mo lekzistans, mo finn toultan gard lespwar ki enn jour Allah pou ékout mo lavwa », confie Bhai Osman, la voix nouée par l’émotion, alors qu’il nous raconte sa vie depuis son enfance. Il n’a jamais connu une enfance dorée et a été scolarisé jusqu’en quatrième. Encore enfant, il se souvient de la misère noire, ses parents ayant plusieurs bouches à nourrir. Son père, Wahed Soobrattee, était cireur de chaussures dans la capitale et fossoyeur au cimetière de Riche-Terre. Très jeune, il se rendait au cimetière pour nettoyer les tombes et donnait un coup de main à son père pour arroser les plantes sur les tombes. Bhai Osman raconte qu’il recevait Rs 2 chaque fin de mois de son père.

Une vie de fossoyeur

À l’âge de 17 ans, il devient fossoyeur à plein temps et recevait Rs 2 par mois pour chaque tombe nettoyée. « Li pa enn travay fasil, bizin kas ros avek la masse, ek parfoi mo papa dir mwa bril kaotchou pou sof ros la, apré mo kas li », se souvient le pèlerin en nous montrant ses mains déformées par les années de travail. « Pa ti fasil pou soign fami, parfoi ena zis delwil dan lakaz, pena cash pou aste manze », avance-t-il. Marié et père de 5 enfants, il ne recevait que Rs 12 par mois. Son père décède à l’âge de 72 ans et il prend la relève pour continuer ce travail dantesque.

Osman Soobrattee raconte que durant des années, il a travaillé en plein soleil, sous la pluie et même pendant les périodes cycloniques. « Mo finn déza enterre dimoune dan cyclone, bizin met lapoussièr dibois dan kabar pou kapav enterre mourda la », se rappelle-t-il Bhai Osman. Cela dit, malgré sa condition de vie, durant toute son existence, il n’avait qu’un seul rêve : emmener son épouse en Terre sainte pour voir la Ka’aba Shareef de ses propres yeux. « Mem kan mo pe fouy kabar, mo fer dua, mo demann Allah pou fer mo dua vinn réalité ki enn jour mo trouv Ka’aba », laisse-t-il entendre.

« Cash halal… »

Avec le sourire, il nous dit que, selon lui, les milliers de personnes qu’il a enterrées ont peut-être contribué à la réalisation de son rêve. Il remercie Allah de lui avoir permis de construire une maison et de marier ses trois filles et un garçon. « Mo finn travay bien dir pou mo gagn enn ti koin, ek mo fier ki mo finn ramas mo cash halal pou fer Umrah », nous dit-il encore. Il raconte que sa journée commence après la Salât de Fajr. Il enfourche sa mobylette pour parcourir la route de Camp-Levieux à Riche-Terre. Il se remémore une mésaventure qui n’a pas refroidi son ardeur : « Kot kabarastan, trois zenes atak mwa gramatin, zot pran mo chopinn dithe ek mo dipain, zot manzé. Fouy dan mo pos, zot pran mo cash ek dir mwa aler. »

Aujourd’hui, après 60 ans à côtoyer les morts, Osman Soobrattee annonce à son épouse en début d’année son intention de l’emmener accomplir l’Umrah. « Mo finn profiter ramas cash zour Shab-E-Baraat ek zour Eid pandan 2 an, ek mo finn travay bien dir pendan tou sa banana la », dit-il, ému. Ainsi, samedi dernier, c’est en compagnie de son épouse, à moitié paralysée, qu’il effectue le voyage en Terre sainte sous la responsabilité de l’Imam Noorooddeen Auhammud du Noorie Islamic Movement. « Zot tou finn bien pran nou kont, ek surtou zot finn pran kont mo madam. Mo finn gagn enn déziem fami dan Makka », s’enthousiasme-t-il.

Il convient de souligner que Bhai Osman fait l’appel à la prière (Adhân) à la mosquée de Camp-Levieux durant ses moments libres dans la soirée. Il remercie tous ceux qui ont rendu ce voyage possible, en particulier ses amis de Camp-Levieux.

Porté manquant durant 24 heures à Makka

Cette semaine, en plein Umrah, alors que Bhai Osman Soobrattee était en compagnie de quatre personnes pour effectuer les sept tours de la Ka’aba après la Salât de Maghrib, il perd soudain de vue le groupe et cherche désespérément son chemin pour retourner à l’hôtel, situé à 700 mètres du Haram Shareef. Sans paniquer, il tente de retrouver son chemin dans une foule compacte, tous vêtus de blanc.

« Mo finn rode mo simé, mé mo finn sorti enn lot plas  », explique-t-il. Pendant ce temps, l’alerte est donnée au sein du groupe Noorie Islamic Movement. Toute la nuit, ils font le tour du Haram Shareef et arpentent la route d’Ibrahim Khaleel, de long en large, jusqu’à Fajr. Un autre groupe de pèlerins prend ensuite le relais pour continuer les recherches. Il est finalement retrouvé dans l’après-midi, presque 24 heures plus tard, par la société saoudienne Nusuk, qui s’occupe des pèlerins.

Le premier geste de Bhai Osman Soobrattee, après cette mésaventure, fut d’accomplir quatre rakaat de salât pour remercier Allah. Il raconte : « Mo koné ki zot pa pou abandonn mwa, ek mo finn toultan gard l’espoir ki zot pou trouv mwa. » Il explique avoir marché des kilomètres sans manger, sous un soleil de plomb, et s’être endormi dans une mosquée pendant deux heures avant de reprendre sa route. « Mo dir, si mo bizin mor, mo pou kontan mor dan Makka, mé mo ti pe sagrin pou mo madam ki malad », avance notre interlocuteur.

Bhai Osman ne trouve pas les mots pour remercier tous ceux qui ont passé la nuit à sa recherche, en particulier Shameem Dobir et l’Imam Noorooddeen Auhammud, qui n’ont jamais perdu espoir de le retrouver. Bhai Osman Soobrattee nous confie qu’il a l’impression d’avoir pris une deuxième naissance, considérant cette épreuve comme un test pour les vrais croyants.

À présent, il a hâte de pouvoir se recueillir auprès du ‘rawdah’ du Prophète Muhammad (saw) à Madinah, à l’occasion du Yaum-un-Nabi.

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