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À 100 ans, Bibi Rookia Ghamy incarne la mémoire vivante d’un siècle de courage, de foi et d’amour. Entourée de ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, elle demeure le socle d’une famille unie autour de ses valeurs.
Dans une petite chambre imprégnée de chaleur familiale, une femme au sourire lumineux accueille ses visiteurs. Assise sur son lit, le visage serein et rayonnant, Bibi Rookia Ghamy dégage une énergie douce et une joie de vivre contagieuse. Sa voix claire, malgré le poids des années, témoigne d’une vivacité d’esprit rare. Pourtant, elle n’est pas une centenaire comme les autres.
Née le 24 août 1925 à Camp-Diable, Bibi Rookia grandit dans une époque où la vie était rude, sans confort moderne, et où chaque journée exigeait courage et endurance. Elle n’a jamais fréquenté les bancs de l’école, mais possédait une mémoire exceptionnelle. Ses proches se rappellent comment elle étonnait tout le monde par sa capacité à multiplier les chiffres mentalement. Dans un temps où peu de femmes avaient accès à l’éducation, ce don faisait d’elle une personnalité respectée dans son entourage.
Très jeune, elle développe une passion pour la couture, un art qui lui permet non seulement de contribuer au bien-être de sa famille, mais aussi de s’exprimer à travers l’aiguille et le fil.
Une vie de famille exemplaire
À 19 ans, elle épouse Abdoola Modoola, alors plombier à la Central Water Authority (CWA). Ensemble, ils s’installent à Plaine-Magnien, puis à Mahébourg, où ils bâtissent une vie simple mais solide. Mère de six enfants – cinq garçons et une fille –, elle veille de près à leur éducation, leur transmettant des valeurs fortes : respect, honnêteté, travail bien fait et piété. Ses enfants reconnaissent en elle bien plus qu’une mère : une enseignante sans école, une boussole morale et un véritable baobab familial.
En 1994, elle perd son époux. Une épreuve difficile, mais elle ne se laisse jamais abattre. Ses enfants, reconnaissants de tout ce qu’elle avait fait pour eux, l’entourent de soins et d’affection. Elle devient alors la doyenne de la famille, celle vers qui tous se tournent pour trouver réconfort et sagesse. Aujourd’hui, bien qu’un peu dure d’oreille et moins mobile, Dadi Rookia garde une grande dignité, toujours entourée de la tendresse de ses fils et belles-filles.
Profondément pieuse, Dadi Rookia a accompli le Hadj à deux reprises, accompagnée de son fils Ahmed. « Mo kontan mo ti ale Hadj. Dan Makkah, mo ti get Kaaba », se remémore la centenaire avec joie. Ces voyages spirituels restent pour elle des souvenirs précieux. Elle a également voyagé en Italie et en France, pour rendre visite à sa fille aînée Rashida, installée à l’étranger.
Les joies simples de la vie
Dadi Rookia aime les choses simples : une promenade en voiture, un repas composé de brèdes et de pommes de terre, ou encore partager des récits de jeunesse. Elle évoque souvent ses longues marches pour aller laver le linge à la rivière, avant de préparer le repas du soir. « Mo ban zenfan ti mo priorite. Mo ti pe dresse zot linz asoir pou zot gagne linz prop lendemain », dit-elle avec émotion.
Lorsqu’on lui demande le secret de ses 100 ans, Dadi Rookia répond humblement : « pena sekre, zis Allah ki koner. » « Personn pa ti atann mama pou trouv 100 ans », avance son fils. Pour ses enfants et petits-enfants, cependant, cela ne fait aucun doute : son amour inconditionnel, sa discipline et sa foi sont les clés de sa longévité. Aujourd’hui, Bibi Rookia est entourée de 17 petits-enfants et 5 arrière-petits-enfants, tous fiers de cette source d’inspiration.
Pour ses proches, Dadi Rookia demeure le socle de la famille, unissant chacun autour des valeurs de respect, d’amour et de solidarité. Elle ne manque jamais de remercier ses enfants et leurs épouses pour l’affection dont ils l’entourent, formulant un souhait sincère : que tous vivent en harmonie, dans la paix et la fraternité.
Une richesse inestimable
Malgré son grand âge, Bibi Rookia Ghamy caresse encore des rêves, notamment celui de voyager à nouveau si Dieu lui en donne la force. Son regard pétillant reflète un siècle de labeur, de sacrifices et d’histoire. Elle n’a peut-être ni richesses matérielles ni secrets de longévité, mais elle possède un trésor bien plus précieux : l’amour de ses enfants, le respect de ses petits-enfants et la gratitude de toute une famille.
