Le cancer est la deuxième cause de mortalité des maladies non-transmissibles dans le monde, selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Toutefois, avec les avancées technologiques, il est possible de vivre une vie normale avec le cancer s’il est traité à temps. Explications du Dr Sahiboullah Sohawon, cancérologue et radiothérapeute.
Le cancer, c’est quoi ? « Le cancer est une maladie où les cellules du corps humain se divisent de manière incontrôlée et se développent de manière anarchique. Elles peuvent finir par former une masse dans le corps appelée tumeur », explique le Dr Sohawon, actuellement à Maurice après avoir exercé en Belgique et en Suisse.
À Maurice comme ailleurs, les hommes sont surtout touchés par le cancer du côlon, suivi du cancer de la prostate. « Ce sont des cancers évitables, qui peuvent aisément être traités à condition de les détecter très tôt », indique le médecin. Et, chez les femmes, le cancer du sein est le plus fréquent suivi du côlon et ensuite le cancer du col de l’utérus. « Là aussi, il s’agit des cancers pouvant être prévenus si on les dépiste tôt », ajoute-t-il.
Il existe des symptômes visibles mais aussi invisibles. « Le cancer du pancréas, par exemple, se développe de manière insidieuse. C’est avec le temps, quand le patient fait face à une jaunisse, qu’on arrive à découvrir ce cancer et, là, dans souvent des cas, c’est déjà trop tard », souligne le médecin.
C’est pour cette raison que la prévention est essentielle, selon le médecin. Et, la Journée mondiale contre le cancer, observée ce dimanche 4 février, vient mettre l’emphase sur l’importance de la détection du cancer le plus tôt possible pour avoir le meilleur traitement. « Le cancer est une maladie redoutable, mais si le traitement est fait à temps, il est possible de vivre plus longtemps dans de bonnes conditions générales», précise le Dr Sahiboullah Sohawon.
Pour ce qui est des traitements, le cancer peut être traité de trois façons différentes, notamment la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie. Et, plus récemment, depuis 2010 en Europe et aux états-Unis, il y a l’immunothérapie du cancer qui vise à mobiliser les défenses immunitaires du patient contre sa maladie.
Razia, ancienne patiente du cancer : «Les dépistages précoces peuvent nous sauver la vie»
Dans le cadre de la Journée mondiale contre le cancer, nous avons rencontré une ancienne patiente du cancer du sein qui a survécu à la maladie. Elle a vécu des souffrances extrêmes, mais s’en est sortie grâce aux traitements nécessaires. Rencontre.
Razia (prénom fictif) se rappelle du jour où elle a appris qu’elle était atteinte du cancer du sein. « J’étais à l’hôpital quand le médecin m’a dit que j’étais atteinte d’un cancer du sein de grade 2. J’étais restée bouche-bée. Pire, ma mère est morte d’un cancer. Je craignais de finir de la même façon », nous dit-elle.
Stress et optimisme
Heureusement, elle n’a pas attendu longtemps pour obtenir de l’aide médicale. Les médecins lui ont expliqué que de nos jours la science a fait des progrès considérables et que l’on peut guérir du cancer s’il est détecté à un stade précoce. « À ce moment-là, au lieu de me laisser aller à la déprime au sujet de ma maladie, j’ai préféré me donner une chance de me guérir. Je suis sûre que ce type d’attitude positive m’a aidée énormément pendant mon traitement », ajoute-t-elle.
Parmi d’autres facteurs qui aident pendant le traitement, on peut citer l’affection de la famille. « C’est une période critique de votre vie où vous avez besoin de l’amour et de l’affection des membres de votre famille. S’ils sont à vos côtés, votre traitement sera plus facile», estime-t-elle. Pendant une année, elle a suivi un traitement de radiothérapie et de chimiothérapie avant une intervention chirurgicale pour l’ablation du sein.
Même après sa mastectomie en 2011, elle a continué la chimiothérapie qui selon elle tue les microbes. « Après mon opération, c’était une épreuve difficile car je vivais mal la perte de mes cheveux et je sentais la nausée quand je mangeais. De plus, vous avez l’impression d’avoir perdu votre féminité. Toutefois, c’est le moment où vous devez préserver votre optimisme. Votre condition s’améliorera plus facilement si vous évitez le stress », conseille-t-elle.
Dépistage régulier
Razia conseille aux jeunes filles de se soumettre à un dépistage régulier, au moins une fois par an. Elle ajoute que ces dépistages sont offerts régulièrement par le ministère de la Santé dans de nombreux endroits. Elle conseille fortement de ne pas négliger ces tests en pensant que vous n’êtes pas affectée. Mieux vaut prévenir que guérir. Notre interlocutrice estime de plus que le fait d’assister à des séminaires et des discussions sur les questions de santé aide beaucoup. « Être informée de ces problèmes de santé vous encourage à manger sainement et à faire de l’exercice »,
avoue Razia.
Razia demande également aux parents et aux gens en général de ne pas éviter les personnes qui souffrent de cancer. Elle fait allusion à un incident où quelqu’un l’avait rencontrée après une longue période et lui avait demandé combien de temps il lui restait à vivre. « Certaines personnes pensent à tort que toutes les cancéreuses meurent ou que c’est une maladie transmissible, » déplore-t-elle.
Soins pour cancer du sein
Razia nous raconte aussi que l’organisation ‘Breast Cancer Care’ lui a été d’un grand support moral. Après son opération, elle a rejoint l’association. « On y organise des thérapies pour les patientes atteintes de cancer. Elles se rencontrent pour s’exprimer et parler de leur douleur. Le fait de parler aux autres allège un lourd fardeau de votre cœur », se rappelle-t-elle. Entre autres activités, elle pratique également le yoga. Maintenant, elle veut soutenir d’autres patients qui souffrent de la maladie. Elle nous confie qu’elle voyage très souvent avec l’équipe du Breast Cancer Care à Rodrigues pour parler aux femmes rodriguaises et aux étudiantes dans les collèges.
Cancer de la peau : un anti-inflammatoire pourrait être la solution
«Première mondiale» à l’oncopole de Toulouse. Un essai vient d’être lancé pour introduire un anti-inflammatoire dans le protocole des soins des mélanomes les plus agressifs afin d’améliorer l’efficacité du traitement, selon l’institut de recherches du cancer, rattaché au CHU de Toulouse. En bref, il s’agit de traiter le cancer de la peau avec un «banal» anti-inflammatoire. L’essai vise les malades touchés par un mélanome lorsque celui-ci risque «à 50 %» de se métastaser, expliquent les professeurs Bruno Ségui, chercheur en biologie au Centre de recherches en cancérologie de l’Oncopole Toulouse (CRCT) et Nicolas Meyer, onco-dermatologue à l’IUCT-Oncopole. Dans un premier temps, l’essai de phase 1 (premiers tests) va concerner six patients. Puis, six autres en bénéficieront s’il n’y a pas d’effets nocifs. Enfin, dans un délai de 18 mois, s’il n’y a toujours aucun problème, dix-huit malades seront testés avec comme objectif d’ici «trois à quatre ans» une généralisation de cette approche prometteuse.
2607 nouveaux cas enregistrés
Le Dr Shashi Sewsurn est consultant en charge et chef du département de radiothérapie et d’oncologie à l’hôpital Victoria. Elle nous a révélé les statistiques du National Cancer Registry (NCR).
En 2016, 2607 nouveaux cas de cancer ont été enregistrés, soit 1058 hommes et 1549 femmes. En outre, environ 54,8% de tous les cancers surviennent chez les personnes âgées. 46,7% des femmes en âge de procréer sont victimes d’un cancer. Le pourcentage des enfants (0-14) souffrant de cancer est de 1, 6%.
Les cancers les plus communs chez les hommes sont :
1. Colorectal (14,5%)
2. Prostate (13,6%)
3. Cancer du poumon (10,2%)
4. Cancer oral (6.1%)
5. Cancer urinaire (5,6%)
Les cancers les plus communs chez les femmes sont :
1. Cancer du sein (36,2%) : 561 nouveaux cas enregistrés en 2016.
2. Colorectal (9%)
3. Col de l’utérus (6,9%)
4. Ovaire (5,7%)
5. Utérus (5,2%)
Taux de mortalité
Selon le NCR, en 2016, 1342 personnes ont trouvé la mort suite aux cancers, dont 631 étaient des hommes et 711 des femmes. Les trois principaux cancers chez les hommes ayant entraîné la mort comprennent ceux du poumon (20,7%), du colorectal (12,5%) et de la prostate (10,1%). Chez les femmes, les trois principaux cancers entraînant la mort sont ceux du sein (26,2%), du colorectal (11,7%) et du col de l’utérus (6,3%).
31 740 cas à l’unité d’oncologie (hôpital Victoria)
En 2016, à l’unité d’oncologie à Victoria, il y a eu 31 740 patients atteints de cancer.1642 nouveaux cas ont été enregistrés. Environ 200 patients atteints de cancer fréquentent l’hôpital tous les jours. 35 à 45 cas de chimiothérapie surviennent chaque jour. Environ 120 patients subissent une radiothérapie et environ 110 patients sont hospitalisés.
Dr Sewsurn: « Souffrir du cancer ne signifie pas toujours la mort »
Dr Shashi Sewsurn nous explique que le cancer est une croissance anormale et incontrôlable des cellules qui peuvent se produire dans toutes les parties du corps de la tête aux pieds chez les hommes et les femmes de tous âges. Elle révèle qu’à Maurice, le cancer est la troisième maladie mortelle. Elle ajoute que les causes les plus fréquentes du cancer sont le tabagisme, le mode de vie et l’obésité. « à Maurice, les gens ont tendance à manger trop de fast-food. Certaines personnes mangent des barbecues grillés sur des charbons ardents. Le charbon est un poison pour la santé. Il est idéal d’utiliser le four électrique pour faire griller le poulet, la viande ou le poisson », dit-elle. Elle recommande aussi à la population mauricienne d’éviter l’excès de viande rouge et des fritures. Selon elle, pour rester en bonne santé, il est impératif de changer le style de vie.
Elle rappelle que tous les cancers sont préventifs et curables. Elle demande aux gens de se rendre chez leurs médecins à chaque fois que le besoin se fait sentir. « Si vous trouvez une grosseur dans n’importe quelle partie de votre corps, si vous avez de la difficulté à avaler, si vous changez de voix ou si vous remarquez un saignement anormal, consultez un médecin le plus tôt possible. Si vous commencez votre traitement plus tôt, vos chances de vaincre le cancer sont beaucoup plus grandes », précise-t-elle.
Elle souligne qu’à Maurice il y a beaucoup de traitements disponibles tels que la chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie, la thérapie ciblée, la thérapie hormonale et l’immunothérapie. « Avoir le cancer ne signifie pas toujours que vous allez mourir. Il y a des traitements qui peuvent vous apporter la guérison et vous permettre de vivre une vie normale. Il y a eu des cas où les femmes souffrant d’un cancer du sein ont eu une vie saine après leur traitement. Elles sont même tombées enceintes, ont eu leur bébé et mènent une vie normale. La même chose s’est produite avec un homme atteint d’un cancer de la prostate qui non seulement s’est amélioré, mais est aussi devenu père », conclut-elle.